Jean-Paul Tarby, directeur de l’Alliance française de Puebla, nous présente deux programmes axés sur l’accompagnement des étudiants dans la poursuite de leurs études universitaires. Le premier, Campus Connecté, vise à offrir aux étudiants mexicains les outils et l’accompagnement nécessaires afin de réussir leurs études à distance en France. L’autre programme qu’il présente est Passerelle vers l’entreprise, qui vise à faciliter l’intégration des jeunes diplômés des universités publiques dans le monde du travail en collaboration avec des entreprises françaises et francophones.

 

  • Pourriez-vous nous parler du programme Campus Connecté ?

Campus Connecté est un dispositif en faveur de l’égalité des chances dans l’accès au diplôme en France. En effet, il offre des services de soutien, de tutorat et de coaching aux étudiants qui n’ont pas pu réaliser leur mobilité en France à cause de la pandémie et qui ont dû préparer à distance le diplôme qu’ils auraient normalement dû préparer à l’université. Parallèlement, la plupart des étudiants qui bénéficient du service Campus Connecté font partie de la coopération éducative et universitaire française dans le cadre des programmes de bourses de master à distance du Mexique en France.

C’est aussi un outil relativement innovant puisqu’il est unique en Amérique latine et dans le réseau mondial des partenariats français. Le fait de préparer un master à distance crée une certaine asymétrie entre les étudiants qui étudient en France et ceux qui n’ont pas eu la chance de pouvoir effectuer une mobilité dans ce pays. Par le biais de Campus Connecté, nous les aidons à comprendre et à intégrer la méthodologie universitaire française, l’aspect interculturel de la vie étudiante en France ainsi que la langue spécifique utilisée pour préparer leur travail à l’université. Le but de ce programme est de permettre à ces étudiants d’avoir les mêmes chances de réussite que ceux qui ont l’opportunité d’être en France, d’être en contact avec d’autres étudiants, d’avoir accès aux bibliothèques et de pouvoir entrer en contact avec les enseignants.

Campus Connecté propose un modèle de mobilité internationale “sédentaire”, c’est-à-dire une mobilité internationale virtuelle ou numérique qui offre la possibilité d’étudier en France sans y aller. En effet, la pandémie nous a obligés à inventer d’autres moyens pour permettre aux étudiants de suivre leurs études à l’extérieur du pays. Nous nous sommes également rendu compte que, pour des raisons économiques, les étudiants ne pouvaient pas aller en France du fait que la bourse octroyée n’était pas suffisante.

Jusqu’à présent, cela a plutôt bien fonctionné. Nous avons entamé la deuxième promotion et comptons environ 25 étudiants par promotion. Une cinquantaine d’étudiants sont déjà passés par ce programme avec un haut niveau de satisfaction. Il y a des aspects que nous devons peaufiner, tels que les horaires, le rapport entre les volumes de tutorat collectif et d’accompagnement personnalisé, la relation avec les universités françaises où les étudiants sont inscrits à distance, mais il n’en reste pas moins un service de choix pour ces étudiants qui peuvent ainsi s’appuyer sur un tuteur formé et qualifié à leur disposition chaque semaine, individuellement, afin de les aider à comprendre les consignes et le contenu du travail que leurs enseignants de France leur demandent de faire.

Par ailleurs, parallèlement au Campus Connecté, nous travaillons étroitement depuis près d’un an, à l’Alliance française de Puebla, sur un projet piloté par le service de coopération universitaire de l’ambassade de France au Mexique. Il s’agit d’une plateforme d’auto-formation à distance destinée aux étudiants mexicains ayant un projet de mobilité académique en France, axée sur la méthodologie universitaire française et sur certaines spécialités telles que les sciences humaines et sociales, les mathématiques, la physique, etc. En réalité, il s’agit d’une extension en ligne du Campus Connecté et de ses contenus vers une version plus ouverte, plus accessible, plus orientée vers la préparation à l’expérience de la mobilité. Les prémisses de ce projet ont été présentées très brièvement lors de l’une des dernières réunions de l’Association nationale des universités et établissements d’enseignement supérieur (ANUIES) et nous espérons qu’il sera disponible pour la rentrée universitaire 2022 – 2023.
Il s’agit de deux contenus différents pour les étudiants sédentaires et pour les étudiants mobiles. Je pense que cela peut contribuer à garantir de meilleures chances de réussite, étant donné que préparer un diplôme au sein d’un autre écosystème universitaire constitue un défi important et un grand investissement en termes de temps et d’argent personnel ou institutionnel.

 

  • Et que pouvez-vous nous dire sur l’autre programme phare de l’Alliance, Passerelle vers l’entreprise ?

Passerelle vers l’entreprise est un programme conçu dans le cadre de notre politique de responsabilité sociale. Si notre mission première est de promouvoir la culture, de diffuser la langue française et d’encourager le dialogue entre la culture mexicaine et celle de Puebla et la culture française, l’un de nos engagements plus récent, conformément au cadre de valeurs de la Fondation des Alliances Françaises, est la responsabilité sociale, c’est-à-dire agir en tant qu’organisation non gouvernementale socialement responsable pour le bien-être des personnes et pour la mise en œuvre des droits humains fondamentaux.

Nous avons décidé de décliner la responsabilité sociale en plusieurs objectifs dont celui d’égalité des chances dans l’accès à une formation de qualité, la recherche de la réussite dans les parcours d’études et de formation des jeunes. Pour répondre à cet objectif, nous avons conçu deux programmes destinés aux jeunes : Campus Connecté et Passerelle vers l’entreprise. Nous nous sommes rendu compte, en nous basant, entre autres sources d’information, sur les rapports pays par pays de l’UNESCO sur l’enseignement supérieur en Amérique latine, qu’au Mexique, il existe une sorte d’asymétrie entre le volume de diplômes produits par l’enseignement supérieur et la capacité d’absorption du marché du travail. Ce décalage entre enseignement universitaire et insertion sur le marché de l’emploi est un problème qui n’est pas à exclure dans de nombreux pays. Dans cette optique et dans le cadre du programme Passerelle vers l’entreprise, nous recrutons des jeunes qualifiés issus de milieux socioéconomiques moins favorisés pour suivre quelque 200 heures de formation en français professionnel (niveau B2) afin de présenter le diplôme de la Chambre de commerce de Paris en français des affaires.

Le programme ne se limite d’ailleurs pas à l’apprentissage du français des affaires. Il transmet également aux étudiants des stratégies d’insertion professionnelle dans le secteur francophone. Par exemple, nous leur proposons des ateliers sur la méthodologie de l’insertion professionnelle, sur l’entretien d’embauche, sur la rédaction de la lettre de motivation, sur la création d’un profil en français sur les réseaux sociaux professionnels, entre autres. L’originalité de ce programme réside également dans le fait que chaque étudiant est considéré comme un “filleul” dans la mesure où il bénéficie de l’accompagnement ou du parrainage, tout au long de l’année, d’un “parrain” ou mentor, acteur professionnel francophone et membre de la communauté d’affaires franco-mexicaine.

Entretien réalisé par Elena Torralba le 2 mai 2022

 

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